Sacrifice d’une cause noble : Date le 26- 06- 2023
Après l’annonce de la nouvelle lune du mois d’Oulhija 1444 par le Ministère des affaires islamiques, un coup de chaleur
me fouetta le visage. L’heure d’un espoir fugitif avait frappé à la porte. Une balle chaude m’avait frappé à la poitrine !
Tout le monde était en alerte. Le moment opportun était venu. Tout fut en éveil. Il fallait penser d’ores et déjà à la
Fête du grand (Baïram). Une secousse ardente me saisit à l’improviste. La fête du sacrifice était arrivée à grand pas.
C’était le mardi 1er Dou – Alhijja correspondant au 20 Juin 2023. Rapide comme l’éclair, je sortis mon portefeuille du
tiroir. Hélas ! Le montant d’argent qu’il contenait était insuffisant. J’avais refait maintes fois le même compte. Le total
dépassait un peu. Alors, je me pressais à mettre à part la somme dont j’aurais besoin. J’attendais le jour du Souk avec
impatience. Je me dirigeais un bon matin de mercredi en compagnie d’un ami pour aller acheter le mouton dont je
rêvais depuis longtemps. Au bout d’une demi-heure de marche à pieds, nous voilà tous les deux au milieu d’une large
étendue semblable à celle d’une mer. Cette immense parcelle bondait de toutes sortes de bétail. On ne pouvait plus
mettre un pas en avant car l’endroit regorgeait de gens qui se pressaient en foule. Quel remous ! On dit que le courage
est le meilleur rempart. Les moutons allaient et venaient comme si on remuait la terre. Leur mouvement remuait les
cœurs comme les herbes qui remuaient dans le vent. Voilà de gros moutons avec des cornes bouclées qui bêlaient sans
arrêt. On n’entendait plus rien à cause du cri affreux de ces bêtes comme si on avait les oreilles obturées. Quelle
sonnerie odieuse ! Un déluge d’injures s’échappait des bouches des éleveurs comme un insecte qui s’échappait à la
vue. On voyait sur le dos de certaines bêtes des croix multicolores. Cela voulait dire tout simplement qu’elles étaient
vendues déjà à l’avance. Des clients cherchaient à tâtons le mouton qu’ils désiraient acheter malgré la cherté. D’autres
selon le montant d’argent qu’ils portaient avec eux. Quand on jetait un coup d’œil de loin, on découvrait beaucoup de
bêtes marquées par plusieurs signes. On dirait des marques de pas dans la neige. C’était désagréable à voir ! Quelle
angoisse ! C’était semblable à un tapis illustré. Chaque fois que le soleil montait haut dans le ciel, les prix augmentaient
automatiquement. C’était extravagant à croire. Certains vendeurs traitaient les clients avec les termes de mépris. Avec
leur conduite honteuse, ils les toisaient toujours avec dédain. Je n’oubliais pas de vous rappeler qu’on avait marqué le
dos de certains animaux à l’intérieur de l’écurie par des traits en sorte de flèches toutes différentes. Des coups stridents
de téléphone sonnaient comme des sirènes à tout le temps. C’était sans un moment de répit. Quel vacarme ! On dirait
un coup de tonnerre qui venait de loin avec une chute de pluie à verse. Les prix allaient drôlement augmenter. C’était
pour n’importe qui une abolition de la mémoire. Plusieurs personnes se demandaient ce qu’il allait arriver. D’autres
voulaient que les prix eussent une baisse urgente mais c’était utopique malheureusement. C’était pour pouvoir acheter
la bête qu’ils allaient offrir en sacrifice le jour de la fête. Sinon, ce sera une ébullition des esprits ou un choc des idées.
Alors il ne fallait pas corrompre la joie de quelqu’un car on dit que l’inquiétude corrode l’homme. Il faut fêter le jour
de l’ Aïd quoiqu’à ‘avec peu. Sinon on aura lâché les rênes ou comme on dit lâché l’école pour le labour. Ibrahim, le
Messager de Dieu n’avait pas raté l’occasion. Plusieurs clients avaient doublé tous leurs efforts par une force inouïe
afin de pouvoir porter le fardeau. Les vieillards, les vieilles dames essuyaient continuellement la sueur qui coulait de
leurs fronts car la chaleur torride d’été les offusquait de temps à autre. On trouvait une troupe de gens étendus ça et là
en bavardant sans cesse comme si on était à l’intérieur d’un film cinématographique. On entendait dire que les prix ne
diminueraient jamais. Les moutons continuaient à apparaitre en masse avec toujours le même montant. La cherté
restera toujours à sa place sans un sou de moins ni de plus. Chacun devait se débrouiller et enterrer son père comme il
voulait. Ce message a été dit par nos aïeux. Chaque personne essayait de trouver le butin qu’elle cherchait. Ceux ou
celles qui n’avaient pas fait un peu d’économie fouillaient leurs poches de fond en comble dans l’espoir d’y avoir laissé
quelques pièces de monnaie, mais en vain. C’était un déficit difficile à combler. Quel fouillis d’idées ! Que faire ? Il
sentait qu’on lui avait fauché l’herbe sous les pieds. Aller à la banque pour un crédit à court terme et pour pouvoir
acheter à crédit. Voilà on avait trouvé le fil d’Arian. Le problème était résolu. C’était un vrai coup de cloche pour les
nécessiteux. N’était-ce pas un enfouissement de trésor, la capacité de pouvoir acheter ? Tout le monde savait que les
dépenses allaient sans nul doute cuber. En un clin d’œil, un cliquetis de mots bouleversants s’échappa de la bouche
de certaines personnes qui menaçaient les clients. C’était comme une pluie diluvienne. Cela attestait qu’il y avait un
malentendu qui menait peut-être à la clôture des débats. Mais tant que la fête était encore loin, l’homme malin n’aura
ni foi ,ni loi. On dit que la nécessité fait quand même loi. Comme c’était loin ! Pour la majorité, c’était un désaccord
qui pouvait provoquer un obstacle mais le citoyen ne croyait pas à ce bluff. Lorsqu’on s’approchait d’un troupeau de
moutons, on se sentait au milieu d’une troupe de soldats qui braquaient vers nous leurs armes. Comme c’était bizarre !
On n’entendait que des coups de cornes. Beaucoup de bêtes se donnaient de forts coups de cornes. Certaines nous
fusillaient d’une paire d’yeux chassieux. Si on ne se sauvait pas furtivement, les farouches moutons nous attaqueraient
brusquement. D’autres ne cessaient de bêler en ruminant avec leurs dos tout bariolés. Quel larmoiement ! On voyait
tout en noir. Le souk était bourré de bétail. Pour aller d’un coté à l’autre, il fallait trouver le passage en bousculant et en
effarant en même temps la cohue. Sinon on vous cracha au nez car beaucoup de clients n’étaient pas à la noce. Je vous
rappelle que toutes le écuries grouillaient de toutes sortes de moutons. La vente se déroulait en plein air : sous les
tentes solidement bâchées, au bord des routes. Partout on ne voyait que les moutons, les boucs, les brebis, les chèvres
avec de gros yeux comme des morceaux de charbons noirs. On n’entendait parler que du marchandage qui était selon
mon opinion une discussion animée à laquelle tout le monde voulait participer car la vente était discutable. On essayait
tout simplement de ne pas laisser le dialogue se dissiper ou aller s’évanouir en fumée. Une fois la bête vendue,
on la cédait à son nouveau propriétaire après l’avoir payée cash ou comptant ou même par chèque. Bravo ! Hourra !
celui-ci conduisait sa bête avec une corde très solide et l’emmena chez lui. Ça y est ! Plus de chamaille, plus de querelle.
On voyait encore de loin d’autres personnes qui conduisaient leurs moutons vers les camionnettes pour les transporter
chez eux ; mais la cherté des prix restait toujours à sa place, elle ne diminua pas d’un sou, au contraire, elle filait comme
des flèches. Quel conflit ! Beaucoup de gens trouvaient des difficultés à l’achat. Pour trancher le différend, il fallait
essayer de doubler d’effort en acceptant cependant le combat quoiqu’il fût. Sinon, on finit par perdre l’espoir : soyons
sûrs et certains. Sache cher lecteur, chère lectrice que la guerre est l’acceptation de la mort. J’ai encore tant de choses à
vous dire. La discussion était à mon avis un tort. La journée était un tollé pour la majorité car la hausse des prix était un
déluge ou un torrent pour l’homme ou pour la femme. Ecraser n’importe qui dans une discussion, c’est mettre un
oiseau sur la braise, c’est scier la branche sur laquelle on est assis, c’est aussi sauter d’une branche à l’autre, c’était
faire une vérification stricte : soulever la bête, lui ouvrir la gueule pour voir si ses dents sont solides ou périmées, si elle
n’est pas aveugle, si ses oreilles ne sont pas très courtes ou si elle n’a pas de plaie qui la fait souffrir, si ses cornes ne
sont pas brisées ou si elle ne saignaient pas. On continuait à passer la main sur tout son corps pour s’assurer qu’elle
est saine et sauve, si ses yeux ne saillaient pas. Voilà enfin comment se faisaient l’achat et la vente. C’était en plein air.
Cela se passait dans une journée brûlante. Avec leur figure joviale, certains paysans continuaient à régler leurs affaires
avant de perdre leur espoir sans avoir rien gagné. On dit que le temps perdu ne se rattrape jamais. Des fois, le vendeur
et l’acheteur s’entendent comme larron en foire mais attention, on dit que l’occasion ne fait pas le larron. On entendait
à tout le temps des voix rauques qui venaient de partout. C’était un appel de la conscience : approchez-vous, messieurs,
mesdames ; vous avez devant vous toutes sortes de bêtes ; choisissez celle qui vous plait. Ayez un peu de courage. Ne
perdez pas votre temps. Achetez d’après l’argent que vous portez avec vous. Allez, faites vite.ne fait pas le badaud cher
client. Faites vite avant de regretter de n’avoir pas eu du courage. C’est la dernière journée. A quoi sert de blaguer ou de
monologuer. C’est moche ! N’hésitez pas en parlant. Quoiqu’il arrive, la crise peut s’éterniser encore quelques années.
N’ayez aucune crainte. Vous êtes en temps héroïque. Vous êtes en même temps les héros de l’aventure. Les coups de
téléphone sonnaient sans cesse. C’était un coup de théâtre. Quelle étrangeté ! Quelle onde agaçante et tragique !
Le pouvoir d’achat était cette année comme un alpinisme. Pour aller du pied d’un mont jusqu’à la cime, il fallait allonger
le pas chaque fois qu’on sentait qu’on allait retourner vers l’endroit du départ. On dit que la guerre amène la famine.
Oui, ceci est vrai car une idée en amène toujours une autre. C’était une année par-dessus les bords. C’était un moment
plein comme un œuf où l’argent coulait à pleins bords. Les fellahs criaient à pleine gorge. L’achat et la vente se faisaient
partout : en plein air, en pleine rue, sous les tentes. Tout le monde respirait à pleins poumons à cause de la chaleur
cuisante qui piquait la peau. L’argent coulait comme le sang dans les veines. Il ne fallait pas le laisser couler goutte à
goutte. Sinon on n’arriverait jamais au but qu’on s’est proposé soyons sûrs et certains. Les vendeurs voulaient gagner
de l’argent à brûle- pourpoint. Ils couraient comme des dérapés. Les chevreaux, les agneaux, leurs mères bêlaient sans
arrêt. leurs cris abominables ressemblaient à celui d’un paon. C’était horrible. Quel criaillement ! Pour les petits enfants,
c’était un effroi. Le mouton actuellement est devenu comme un trésor. Pour l’acheter, il fallait le tâtonner maintes fois,
l’examiner comme on gratte la terre avec son pied. C’était comme le contrôle d’une caisse. C’était en fin comme un
invalide à qui on fait un examen médical. Le paysan, c’est-à dire le client, dans ce cas-là, devait faire une vérification
stricte : soulever la bête, lui ouvrir la gueule pour voir si ses dents sont solides ou comme un bout de bois tout périmé
car c’est de l’argent qu’il va cracher comme un volcan qui crache des laves. Bientôt des liasses de billets passaient de
main en main. C’était comme un tas de feuilles mortes qui se détachaient d’un arbre. Tout bileux, le jeune homme se
mit à verser son argent en les comptant billet par billet. Quant à moi, je restais muet devant ce spectacle unique en son
genre .Des fois, je m’affolais vis-à-vis de ce qui se passait devant moi. (Vais-je moi aussi déverser mon argent comme un
avion qui déverse ses bombes ?) Dis-je, le cœur plein de ténèbres. Est-ce une année de famine, ou de misère ou de
pénurie ? C’était une année de vacarme, de branle-bas. C’était à mon avis un branlement, un malaise. Le pus grand
nombre de citoyens n’avaient pas gouté un morceau de viande du mouton de la fête de l’aïd à cause de la cherté.
C’était l’ennui de la vie. On dirait qu’ils étaient tombés entre les mains de l’ennemi. Je conclue mon compte par ce style.
Tout le monde a fait couler son argent. Avec un effort suivi d’un serrement de dents. La fête était arrivée comme une
sirène d’alarme .On était tout prêt à la bataille, homme et femme. C’était comme un coup d’épée dans l’eau. Pour ne
pas perdre du temps, il fallait hâter le pas en allant par saut. Devenir un bateau qui saute sur une mine. N’était-ce pas
un combat causé par une ruine ? Certaines personnes couraient comme des dérapés. D’autres ne remuaient ni pattes ni
pieds. Ceux-ci cherchaient dans leurs poches en se remuant. Ceux-là faisaient la navette en monologuant. C’était une
fête pleine de surprises. C’était tout un événement ! Des gens se pressaient en foule, s’entrechoquaient comme des
ondes. On entendait dire que le temps resterait maussade, qu’il allait encore se détériorer. Quel mauvais augure ! Voilà comment avait pris fin la fête. Je souhaite à tous mes collègues bonne fête et longue vie avec une trêve de dialogue.
Ecrivain : Moumni A, Enseignant retraité, demeurant à Zaio, Hay Sidi Othman , Province de Nador (Maroc)